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Une APPROCHE PARTICIPATIVE pour l’innovation produit

Photos : Astredhor ; Linda Kaluzny-Pinon

Eval’Innov a permis de poser un autre regard sur une nouveauté en actionnant des leviers plus nombreux ou différents, notamment l’analyse sensorielle.Linda Kaluzny-Pinon

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Qui ne rêve pas d’une recette pour réussir le lancement d’une innovation ? Peut-être suffit-il de s’associer en termes de filière. C’est que les critères de qualité varient selon que l’on soit producteur (facilité de production ou résistance aux parasites), acheteur de centrale ou de jardinerie (tenue et compacité) ou consommateur (floribondité et développement). Or, la mise en production ne tient pas suffisamment compte des critères de l’aval. Il est donc nécessaire d’identifier les produits les plus attendus par les utilisateurs et de caractériser le comportement et la qualité de ces produits tout au long de la filière.

L’action nationale Eval’Innov de l’Astredhor nous a livré récemment une méthode d’évaluation — aisément reproductible — du risque de mise sur le marché d’une nouveauté. Un collectif porté par l’Astredhor Loire-Bretagne a expérimenté « en vraie grandeur » le lancement du bégonia Funky® de l’obtenteur allemand Bénary. Les autres partenaires se déploient : Senso’Veg ESA (École supérieure d’agricultures d’Angers - 49), les jardineries Jardiland et Truffaut, avec le concours de Val’Hor et de FranceAgriMer.

« Tout d’abord, il fallait appréhender les différences de perception entre les différents acteurs de la filière », introduit Alain Ferre, responsable de l’Arexhor Pays de la Loire. « Ensuite, il convenait de comprendre les échecs et réussites des innovations. » Les moyens mis en œuvre se sont appuyés sur divers postulats. Ainsi, le consommateur n’avait pas d’attente claire et n’avait porté aucun jugement a priori sur le végétal. Ce constat a conduit à tester d’abord le produit, puis à l’adapter en fonction des résultats. Considérant les visions propres de chaque échelon du parcours, les tests ont été réalisés en conditions réelles avec de vrais acteurs fonctionnant comme évaluateurs, sans le recours à des simulations en station d’essai.

En vraie grandeur

L’évaluation Eval’Innov a été effectuée suivant deux filtres : un qualitatif et un économique, sachant que la note finale serait revue à la baisse en fonction de l’évaluation économique. L’enjeu était bien de trouver le bon critère économique afin de définir le seuil de performance. Les différents épisodes d’appréciation se sont étalés durant le circuit réel, depuis la production jusqu’à l’utilisation en passant par le transport et la vente : performances produit, données sur les ventes, intentions d‘achat, données sur l’utilisation produit, satisfaction client (ce jusqu’en novembre).

En 2016, les tests utilisateurs ont préféré Funky® à la variété témoin ‘Illumination’® avec ou sans un packaging différentiant (pot rose, chromo grand format sur l’anse). Toutefois, au final, aucune différence significative n’est ressortie entre les deux végétaux, contrairement aux professionnels plus satisfaits par Funky®.

En 2017, les tests sur la phase d’utilisation s’appuyaient sur un itinéraire technique optimisé « satisfaction client » avec fertilisation enrobée, rétenteur d’eau, chromo avec phrases informatives – toujours en comparaison avec Begonia x tuberhybrida Illumination®.

Le recours à l’analyse sensorielle

La forme du végétal est un critère ornemental important pour déterminer sa valeur commerciale. Il était logique que Eval’Innov s’appuie sur l’analyse sensorielle pour le recueil de la perception des consommateurs et de leurs intentions d’achat.

Une batterie de tests a été menée à l’initiative de Ronan Symoneaux. L’enseignant-chercheur de l’Unité de Recherche Grappe de l’ESA est co-animateur de Senso’Veg ; cette plateforme sensorielle est membre de la structure fédérative de recherche SFR Quasav (Qualité et santé du végétal).

Ronan Symoneaux milite pour l’intégration de la sensorialité dans les parcours d’innovation variétale et commerciale ; il évoque même le « sensotypage » terme forgé à l’instar de phénotypage. En création fruitière, il peut s’agir de tests de dégustation mais aussi visuels, comme pour les récentes variétés de pommes à chair rouge. L’évaluation sensorielle s’appuie sur des méthodologies adaptées : des panels de consommateurs entraînés ou pas, des analyses statistiques (cartographie des préférences…) de leurs évaluations afin de transmettre des mesures objectives. Ainsi, les notes de caractérisation ou d’appréciation sensorielle doivent être validées en tenant compte de la variabilité (variance) des lots pour choisir la variété la plus prometteuse.

L’analyse sensorielle avait déjà été mise à contribution en ornement, dans des travaux de prédiction des caractéristiques visuelles de rosiers buissons durant une thèse Cifre portée par les Pépinières Desmartis. Des rosiers virtuels (architecture 3 D et morphométrie), des rosiers réels filmés en rotation et des rosiers concrets avaient ainsi été évalués par un panel entraîné de consommateurs à l’appui des travaux de l’UR IRHS — Agrocampus Ouest d’Angers ainsi que du Grappe —.

Une méthode reproductible

« La démarche collaborative et participative entre les acteurs de la filière et les consommateurs a été particulièrement instructive », conclut Alain Ferre. Les informations recueillies durant le projet Eval’Innov contribuent, entre autres, à :

- interpréter de manière correcte les dynamiques de vente,

- connaître les défauts et qualités de son produit,

- connaître la satisfaction client pendant la durée de vie du produit.

Logiquement, les tests qui ont été élaborés pour ‘Funky’® permettraient bien de se lancer dans une démarche de mise au point d‘un parcours pour une innovation donnée par répétition du dispositif. C’est aux professionnels de s’en emparer.

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